Héros pendant la crise Covid19… Voyous quand on s’organise pour nos droits ?

Stop à la criminalisation de nos luttes !

Dans le cadre des nombreuses activités que La santé en lutte (LSL) a organisé ces deux dernières années, nous avons entre autres mené une campagne pour dénoncer les conditions de travail au sein d’une maison de repos à Bruxelles. Des collègues en interne nous avaient alerté sur leur vécu que nous connaissons toutes et tous malheureusement trop bien : pressions quotidiennes, management de la terreur, non-remplacement des collègues absent·es pour maladie, hausse de la flexibilisation, travail en sous-effectif, changements d’horaires de travail, retard allant jusqu’à plusieurs mois de paiement de salaires, etc.

Suite à cette campagne qui s’est axée sur l’organisation des travailleur·euses, des tractages de sensibilisation, des courriers adressés au Conseil d’Administration de la maison de repos et l’organisation d’un rassemblement de soutien autorisé, deux membres de LSL viennent de recevoir une convocation par la police et sont la cible d’une plainte du pouvoir organisateur de la maison de repos.Relever les dysfonctionnements au sein d’une institution semble dès lors être considéré comme un délit par la police et la justice. La prise de conscience publique et médiatique concernant nos conditions de travail dans le secteur de la santé à la suite de la crise Covid parait déjà bien loin…

Pour nous, travailleurs et travailleuses dans le secteur de la santé, ces poursuites constituent clairement une intimidation visant à museler la parole du personnel soignant, en représailles de la mobilisation de travailleur·euses ayant dénoncé leurs mauvaises conditions de travail. Soignez, galérez, mais en silence !

Nous pensons que cette menace de poursuite judiciaire est à voir et comprendre dans un contexte bien particulier et qui dépasse bien évidemment le secteur de la santé. Depuis quelques temps, la répression judiciaire bat son plein en Belgique et touche systématiquement les organisations progressistes qui remettent en cause les attaques contre nos droits fondamentaux et qui osent lever la tête pour un monde meilleur. Les exemples s’enchaînent :

  • Mardi 19 octobre dernier, la Cour d’appel de Liège condamnait 17 travailleur·euses syndiqué·es et responsables syndicaux·ales pour une action de blocage, lors d’un mouvement de grève contre un plan d’austérité d’une violence inouïe en 2014.
  • Lors de la grève de nos collègues des hôpitaux du non-marchand du 17 juin dernier, les intimidations et pressions sur celles et ceux qui osent se mobiliser, dont des réquisitions à domicile, ne manquèrent pas.
  • Récemment, un militant antiraciste qui a osé écrire deux mails à un Bourgmestre pour protester contre une pratique raciste dans la commune se fait poursuivre en justice.
  • Mais aussi, sur les dernières années, de nombreux procès ont été menés contre des militants et militantes impliqués dans la lutte des personnes sans-papiers et migrantes, syndicale, pour l’écologie, contre la guerre, antiraciste, etc.

Aujourd’hui, c’est au tour des travailleurs et travailleuses de la santé de se faire attaquer pour oser dénoncer leurs conditions de travail et le traitement abject qu’ils et elles subissent. A qui le tour ensuite ?

Les attaques prétextant la forme de nos mobilisations ne doivent pas cacher le fait que ce sont bien nos revendications en tant que telles – la lutte des travailleur·euses contre les mauvaises conditions de travail et de vie – qui sont visées. D’ailleurs les questions posées par la police lors de la première audition de notre collègue ne laissent aucun doute : l’enquête vise La santé en lutte. Dès lors, ces deux membres sont visés « au hasard ». Leur identité a été relevée alors qu’ils tractaient dans la rue, ce qui déjà nous avait indigné·es.(1) S’en prendre à quelques un·es pour intimider l’ensemble, c’est bien connu ! Mais s’attaquer à des travailleur·euses qui se mobilisent pour les droits de toutes et tous, c’est s’attaquer à nous toutes et tous !

Rappelons-nous que les méthodes de lutte sont toujours déterminées par l’attitude des dirigeants. C’est leur refus d’entendre les interpellations des travailleur·euses, de remédier aux problèmes qu’ils et elles rencontrent et soulèvent, et qui dans l’écrasante majorité des cas découlent des choix de management qui ne visent que plus de profit au détriment de notre bien-être. Car c’est bien toujours de cela qu’il s’agit : ils refusent de perdre un peu de leurs bénéfices, pourtant mirobolants, notamment dans ce que les investisseurs appellent cyniquement la « silver economy », cette part de l’économie concernant le soin aux personnes âgées. C’est bien leur silence insultant, leur déni de ce qui est dénoncé, leur refus de dialogue, voire les intimidations et menaces de licenciements qui contraignent les travailleuses et les travailleurs à se mobiliser de manière plus visible et plus bruyante.

Nous condamnons avec la plus grande fermeté cette tentative de criminalisation d’actions de travailleur·euses dénonçant les mauvaises conditions de travail qu’ils et elles subissent, tout comme celles de personnes luttant pour une vie digne pour toutes et tous. Il est par ailleurs assez significatif de constater que les responsables de la maison de repos en question n’ont pas fait l’objet d’une enquête alors que les faits signalés dans nos publications et dans nos tracts constituent des illégalités manifestes. Nous attendons toujours…

Cette attaque contre notre collectif montre aussi une chose : les fleurs et les applaudissements alors que nous étions au front sans les armes nécessaires ont vite laissé place au bâton une fois que nous osons lutter pour nos droits ! D’abord la répression policière pour notre manifestation du 13 septembre 2020 et maintenant l’instrumentalisation de la justice à des fins de répression pour nos actions de lutte et de défense des travailleur·euses.Partout dans le monde, le personnel de la santé et les travailleur·euses de nombreux secteurs relèvent la tête. Notre combat ne fait que commencer. Nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à être déterminé·es à ne plus nous laisser faire ! Quand c’est trop, c’est trop !

Face aux attaques de partout, nous devons faire front commun, ne pas nous isoler dans nos défenses, car toutes ces tentatives d’intimidations et de pressions judiciaires sur nos luttes relèvent d’une même logique : nous exploiter et nous faire taire !Partagez ce post, suivez nos futures publications, préparons-nous à nous mobiliser !Solidarité dans la lutte et face à la répression !

(1) Lien du premier contrôle d’identité https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=729214314653606&id=288609832047392