FACE A LA DEUXIÈME VAGUE L’ÉTAT VEUT NOUS RÉQUISITIONNER

Après avoir prévu de déconfiner à cadence forcée les commerces et l’industrie, sans respect des délais permettant de mesurer les effets, voici que le gouvernement prépare l’arrivée de la deuxième vague avec la réquisition du personnel de la santé !

En effet, la politique d’anticipation de ce gouvernement consiste non pas à dépister massivement la population ou à mettre à la disposition de cette dernière les équipements de protection individuelle ni même à ralentir l’appétit des actionnaires mais à préparer les services de soins de santé à la survenue très probable d’une deuxième vague.

Ainsi, pour s’assurer de cette préparation le gouvernement utilise ses pouvoirs spéciaux, c’est à dire, sans débat parlementaire, sans discussion avec le terrain, sans concertation syndicale, bref sans démocratie, pour imposer un arrêté royal permettant la réquisition du personnel des services de soins de santé. Nous nous en sommes procuré une copie (lien en fin d’article).

Sans aucune reconnaissance des efforts consentis par les soignant·e·s jusqu’à présent (si ce n’est de les faire applaudir par la population), le gouvernement prévoit dans cet arrêté royal en cours de finition de réquisitionner le personnel de santé si cela s’avère nécessaire. Alors que les soignant·e·s sont épuisé·e·s et à bout, alors que la pénurie de soignant·e·s est le fruit amer des politiques d’austérité dont le gouvernement est responsable, les personnels des services de santé pourraient être rappelés sur leur temps de repos pour pallier les pénuries de main d’œuvre dans d’autres institutions de soins.

Le gouvernement a été, depuis de nombreuses années, sourd et aveugle à nos revendications concernant les moyens qui nous sont octroyés. Voilà qu’aujourd’hui l’Etat, décide d’y répondre sans y remédier, de manière autoritaire, en instaurant le travail forcé !

En effet, cet arrêté royal prévoit « la possibilité de pouvoir réquisitionner des professionnels de soins de santé ». Cette réquisition peut être activée par les gouverneurs des provinces, l’Etat et/ou les directions des institutions de soins.

Tous les professionnels de la santé sont concernés : « Sont ici visés les professionnels de santé dans leur ensemble, peu importe leur statut de travail (employé, indépendant, …) et leur lieu de travail habituel. »

Cette réquisition pourra être mise en place à partir du moment où les institutions de soins ne parviendront plus à recruter sur base volontaire. Le message est assez clair : si vous n’êtes pas volontaire vous serez forcé·e·s ! « Lorsque le manque visé au 1° ne peut plus être comblé en augmentant la capacité nécessaire sur base volontaire »

Cette réquisition ne nécessiterait par ailleurs aucune concertation avec le terrain ou les organisations syndicales : seuls les directions et l’Etat décideront : « Le nombre de professionnels de soins de santé à réquisitionner est fixé en concertation avec le responsable concerné, l’inspecteur d’hygiène et le gouverneur. »

L’arrêté royal ne prévoit aucune exception règlementaire à la réquisition, ce qui a pour conséquence de laisser un pouvoir discrétionnaire au gouverneur : « Si un professionnel de santé réquisitionné invoque un motif (un devoir professionnel plus urgent, des raisons médicales ou une autre raison grave) l’empêchant d’assumer cette réquisition, il devra en avertir le gouverneur l’ayant réquisitionné dans les plus brefs délais et il appartiendra au gouverneur concerné d’apprécier, au cas par cas, si le motif invoqué est légitime. »

Mais le gouvernement bardé de ses pouvoirs spéciaux ne s’arrête pas en si bon chemin, le refus de répondre à la réquisition peut conduire à des peines conséquentes : « est puni d’un emprisonnement de huit jours à trois mois et d’une amende de vingt-six euros à deux mille euros ou d’une de ces peines seulement, quiconque est réquisitionné en vertu des mesures imposées conformément au présent article, ne remplit pas ses obligations, sans pouvoir le justifier par un empêchement consécutif à l’exécution d’un devoir professionnel plus urgent ou à une autre raison grave. »

En conclusion, ce projet d’arrêté royal est une expression supplémentaire de la politique martiale menée par le gouvernement sans avoir l’air d’y toucher ; il représente une insulte à nos efforts, à nos sacrifices (y compris en vies humaines) et à notre dévouement pour les personnes touchées par la pandémie.

Provoquer une deuxième vague par un déconfinement sans précautions et ensuite surexploiter le personnel de la santé via le travail forcé est tout simplement abominable !

Voilà une preuve de plus, s’il en fallait, que le gouvernement n’a que faire de notre avis, de nos souffrances ni même de nos vies, et que seule la reprise de l’économie et la gestion de ces conséquences importe à ses yeux.

Ce projet d’arrêté royal pourrait par ailleurs permettre le sabotage de toute action syndicale des soignant·e·s en empêchant par exemple toute grève.

Le gouvernement Wilmès a été loué dans la presse pour le contraste entre sa communication et la rhétorique guerrière de Macron. Si le gouvernement des pouvoirs spéciaux n’a pas le langage de la guerre il en a néanmoins les usages. Ce projet d’arrêté est inadmissible !

Lien vers le projet d’arrêté royal :
https://drive.google.com/file/d/1m_SMMzCqyUzVQLMugX6VTVasg4PloX8O/view